Même si mon ancienne prof d’astrologie prétendra le contraire, elle a un problème avec l’intégrité mais aussi la liberté. Un jour, je lui ai dit que selon elle, on était prisonnier de son thème astral. Elle m’a dit ” non, je n’ai jamais dit ça, c’est ton interprétation”. Eh bien pourtant, d’autres élèves ont eu un ressenti similaire à son sujet. Pour en avoir discuté avec une élève dont je partageais la voiture, je ne suis pas la seule à l’avoir entendue dire ” quand on a une planète interceptée dans son thème, on ne peut pas faire autrement que d’être comme ça et on est comme ça toute sa vie.” Quand je lui rappelais ce genre de propos, elle répondait systématiquement ” ah bon, j’ai dit ça, moi?” ce qui faisait doucement rire un autre élève. Cet élève lui a justement dit un jour ” Ne t’étonne pas si plus personne ne vient.”
Ce qui a beaucoup fait réagir ce monsieur, c’est le fait qu’elle ait dit à une élève que son fils allait mourir jeune. Elle a aussi dit à une autre élève que son mari allait mourir. J’ai eu cette personne au téléphone. Elle a démenti ses propos” Mon mari va bien. Ma fille m’a dit que je devrais arrêter l’astrologie, car ça me détruit. Mais j’en suis incapable”. Cette spirale infernale, cette incapacité à mettre le holà, je l’ai expérimentée avec les praticiens de la communauté ésotérique dont je parlais dans la première partie de cette série d’articles. Cette charmante dame, toujours sur le même ton léger, m’a aussi dit qu’avec mon Mars rétrograde dans mon thème, j’aurais des idées suicidaires et des amants foireux jusqu’à mes soixante et un ans. Eh bien, en tout cas, je n’étais pas suicidaire avant de la connaître.
Selon elle, le fait que j’arrête ma thèse s’était joué un an avant que je prenne cette décision, parce que la lune noire avait opéré un mouvement conséquent à ce niveau. Comme j’ai mal pris ses propos, elle m’a répondu ” ah oui mais c’est toi qui as voulu savoir”. Pas tout à fait. Je lui avais demandé une consultation globale et elle m’a parlé d’un projet qui prendrait fin dans quelques mois. J’ai rebondi sur ma thèse et là, elle m’a dit ” tu risques d’être déçue”. Elle m’a encouragée dans ce sens-là et à démarrer mon entreprise à la place.
C’était réellement ce que je voulais faire, face à mes encadrantes dédaigneuses par rapport à mon travail. C’était réellement ce que je voulais faire, pour lancer un projet créatif plus inspirant que la thèse. C’était réellement ce que je voulais faire, face à certains membres de ma famille qui me disaient régulièrement ” quand vas-tu arrêter tes études pour travailler?” . En effet, si j’ai pris cette décision, ce n’est pas parce que je suis un pantin sans consistance.
Et là, au moment où je me suis mise à mon compte, cette merveilleuse prof d’astrologie m’a dit ” tu devrais faire une formation d’esthéticienne pendant un an, ça c’est concret”. Je lui ai fait remarquer que ma famille n’allait pas comprendre que je reprenne encore une formation après mes études prolongées. Elle m’a répondu ” mais tu faisais des études pour le plaisir, ils vont bien comprendre que là, c’est pour travailler”. Non, la thèse n’était pas un divertissement, c’était très laborieux. Je l’ai stoppée parce que mes encadrantes faisaient barrage et ne me soutenaient pas, je ferai sans doute un article à leur sujet plus tard. Par ailleurs, le doctorat est une expérience professionnelle, c’est dans la loi, et il permet de développer beaucoup de compétences efficaces pour l’entrepreneuriat.
J’ai dit à cette prof que je projetais d’autopublier mes tarots, elle m’a interrompue en grognant: ” ça ne ramène pas d’argent”. Pourquoi m’a-t-elle répété pendant des mois que je deviendrais riche et célèbre grâce à mes livres, dans ce cas? On voit qu’elle ne connaît pas les revenus d’un écrivain. Elle m’a aussi dit que je ne gagnerais pas bien ma vie avant 2022. “J’aurais peut-être pu finir ma thèse d’ici-là” me suis-je permise d’ironiser auprès d’elle.
Je suis ressortie en colère de son cours et j’ai commencé à me dire ” est-ce que j’en veux vraiment au destin ou à sa manière de présenter les choses?”
Par rapport à ma vie amoureuse, j’ai été bien servie avec elle. Effectivement, en 2018, elle m’a dit que je me mettrais en couple en 2021, mais que quelque chose se jouerait au printemps 2020. Plus tard, elle a réajusté son discours et m’a dit que ça se concrétiserait en 2022 et que quelque chose se jouerait en 2020, puis en 2021. D’une, j’ai mal pris qu’elle repousse l’échéance. De deux, elle a également dit que j’étais plutôt vouée aux relations légères qu’à une relation durable, le tout avec de belles intonations de tragédienne digne de Racine. Je lui ai dit que j’avais refusé des relations de type sexfriend, elle m’a répondu ” tu as tort”. Je suppose que c’est aussi son interprétation de mon thème qui va me dire comment je dois couper ma viande, tant qu’on y est.
Revenons à cette prédiction du printemps 2020. Le premier confinement a eu lieu. Comme je n’avais pas les idées claires, je me suis attachée à une personne qui correspondait à certains critères prédictifs qu’elle m’avait fourni. J’échangeais par mail avec cette femme transgenre sur le cadre pro et artistique. Personnellement, je ne suis pas attirée sexuellement par les femmes. J’ai des tendances biromantiques, mais je ne me vois pas en couple avec une femme. Cette femme transgenre m’a rejetée, ce qui m’a blessée, pour d’autres raisons que les idées qu’on m’avait mises dans la tête.
Pourtant, ma prof d’astrologie me voyait faire ma vie avec elle. Lorsque je lui ai fait mon retour sur la façon dont j’avais été éconduite, ma prof ne s’est pas excusée de s’être plantée. Elle m’a houspillée parce que je vivais mal ce rejet. Elle s’est dédouanée en disant ” je t’avais bien dit que c’était une relation purement professionnelle” et j’ai dû lui rafraîchir la mémoire plusieurs fois, en insistant, des mois après. Mon seuil de tolérance était sérieusement ébranlé et elle a dit elle-même qu’il valait mieux qu’on en reste là, elle et moi. C’est le meilleur conseil qu’elle m’ait donné.
Dans V pour Vendetta, il est question de défier les lois. Ma prof d’astrologie a un profil intéressant, à ce niveau. Elle a travaillé pendant quelques décennies dans le milieu pénitentiaire, “avec des juges”, comme elle disait, sur un ton fier. Combiner les deux casquettes lui a permis de faire des analyses assez… originales, on va dire. Selon elle, les SDF ont souvent beaucoup de trigones dans leur thème. S’ils se retrouvent à la rue, c’est parce que leur thème ne leur permet pas de suffisamment bien gérer les épreuves de la vie, toujours d’après elle.
Petite observation intéressante: lorsqu’on tape son nom sur google, on ne trouve pas de site web lié à son activité d’astrologue. En revanche, il y a un article qui parle de son homonyme, qui habite au même endroit, qui a exercé la même profession et… cette personne a eu des démêlés avec la justice. Tiens, c’est étonnant.
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